CAMILLE CLAUDEL 1915

Film

Née en 1864, Camille Claudel s’est très vite affirmée comme une sculptrice extrêmement talentueuse, passant presque instantanément du statut d’élève de l’illustre Rodin à celui de muse, maîtresse et alter ego féminin, avant de le quitter en 1895. La suite de sa vie s’apparente alors à une longue descente dans la solitude et l’oubli.

Développant un syndrome de persécution vis-à-vis de Rodin, elle s’isolera dans son atelier, s’aliénant amis, famille et monde de l’art. Internée par ses proches en 1913, elle passera le reste de sa vie enfermée, mourant à l’âge de 79 ans de malnutrition, résultant de la politique de Vichy vis-à-vis des malades mentaux.

En 1988, Adjani incarna l’artiste dans une super production édifiante retraçant sa vie jusqu’à son internement. Avec CAMILLE CLAUDEL 1915, Bruno Dumont signe une œuvre à l’ambition toute autre. Là où le premier film s’apparente à une vaste peinture historique, le deuxième, en se concentrant sur les 3 jours qui précédèrent la visite de l’écrivain Paul Claudel à sa sœur en asile, offre un portrait acéré, minéral et intime, pareil à une eau-forte.

Projet né du désir de Juliette Binoche de travailler avec le réalisateur de LA VIE DE JESUS, HADEWIJCH, HORS SATAN, le film s’attache à dépeindre le bouillonnement des émotions traversant cette femme jugée trop excentrique par la société, et qui pourtant semble trop vivante pour être symboliquement enterrée dans un asile.

L’émerveillement de Camille lorsqu’elle apprend la venue de son frère contraste ainsi aussitôt avec une absence songeuse lorsqu’elle observe un détail de son environnement, avant de laisser place à une véritable détresse quand les souvenirs de ce qu’elle a été butent contre la réalité de l’enfermement et de la folie.

Entourée de véritables patients et soignants, l’actrice a dû dépouiller, oublier son jeu. Dumont quant à lui, s’est chargé de recueillir l’émergence des émotions sur les visages, en les scrutant attentivement et de manière passionnante, pour un résultat bouleversant.